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Interview : Max Durante

"La musique et l’art ont perdu le pouvoir de déferler, de précéder, d’expérimenter et donc de transgresser."

par François Zappa

Le DJ et producteur légendaire Max Durante confirme dans cette interview ce que nous avions déjà deviné : les Futuristes ont inventé la techno. Grâce à sa vision artistique qui plonge ses racines dans les œuvres de Russolo et Duchamp et survivant de milliers de raves, Max Durante nous rappelle que Rome était un point important sur la carte de la musique électronique. Il jouera quelques disques le 26 novembre au Razzmatazz dans le cadre de la programmation de l’Ombra. L’histoire par le mix.

Photos: KEYI STUDIO/KEYI MAGAZINE 

— Tu t’es intéressé aux premiers groupes électroniques italiens comme Kirlian Camera, Neon ou Die Form ?

— On pourrait qualifier les années 1979 à 1982 de pure expérimentation. À mon avis, c’est aussi la meilleure période pour de nombreux groupes italiens et étrangers. Je suis attiré par cette période, mais je l’ai appris quelques années plus tard ! Je suis né en 1970, j’étais trop jeune à l’époque, mais en 1983/84 j’ai eu la chance que mon frère aîné m’emmène avec lui à ses premiers concerts de punk. Il se produisait souvent au Legendary Uonna club à Rome, quand j’avais seulement 13 ans. J’y écoutais de la New Wave, de l’Ebm, de l’Industrial, du Punk….  Ces années ont été importantes pour ma formation. C’est là que j’ai découvert de nombreuses influences aussi bien dans la musique que dans l’art.

Tous ces apports ont lentement enrichi mon bagage culturel. Ayant deux frères aînés, j’ai eu la chance d’écouter indirectement leur musique, mais je ne me suis jamais attardé sur un seul genre.

Ce qui m’a d’abord détourné de la musique, c’est mon amour du sport ! En 1981, je suis tombé amoureux du football américain. J’ai commencé à jouer dans une équipe et je pensais devenir joueur de football américain professionnel, jusqu’à ce que je tombe amoureux de la figure du DJ et que je devienne DJ !

— Je suis aussi un grand fan du futurisme. Tu as dit que les théories de Russolo ont joué un grand rôle dans ta façon d’appréhender la musique. Penses-tu que, d’une certaine manière, ces artistes italiens ont anticipé la techno ?

— Absolument oui !

Russolo est l’évolution. Sans lui, des artistes comme Einstürzende Neubauten n’auraient peut-être jamais existé (dans leurs premières interviews, ils ont d’ailleurs déclaré que Russolo était leur plus grande inspiration).

Russolo nous a montré qu’il a été fondamental pour tout le monde depuis Stockhausen, John Cage, Luciano Berio, Kraftwerk et même pour nous, les visionnaires des années 90. Entre Russolo et la techno, il y a un cordon ombilical !

Russolo n’a pas seulement été fondamental pour la techno, il est le père de nous tous. Il a précédé l’avenir et le bruit ! Il a été fondamental pour l’évolution musicale de 1913 à aujourd’hui ! Russolo est l’auteur de l’Art des Bruits (d’où le nom du groupe Art of Noise).

L’Art des bruits est considéré comme l’un des textes les plus importants et influents de l’esthétique musicale du XXe siècle.

L’Art des bruits est un manifeste futuriste écrit par Luigi Russolo dans une lettre de 1913 à son ami et compositeur futuriste Francesco Balilla Pratella. Russolo y affirme que l’oreille humaine s’est habituée à la vitesse, à l’énergie et au bruit du paysage sonore industriel urbain. De plus, cette nouvelle palette sonore exige une nouvelle approche de l’instrumentation musicale et de la composition. Il propose une série de conclusions sur la façon dont l’électronique et d’autres technologies permettront aux musiciens futuristes de « remplacer » la variété limitée de timbres que l’orchestre possède par une variété infinie de timbres de bruits, reproduits avec des mécanismes appropriés.

Russolo ne nous a pas seulement montré le bruit. Il est allé plus loin avec son instrument l’Intonarumori (l’ancêtre du synthétiseur), qui nous a légué la formule de la future source sonore : le synthétiseur.

Il a été le véritable créateur de la musique expérimentale, la base de tous les courants musicaux, qu’il s’agisse de la musique expérimentale, de la musique bruitiste, de la musique industrielle, du New Beat, de l’EBM, de la Techno et d’autres encore !

— Outre Russolo, tu as nommé Marcel Duchamp comme influence en raison de son apologie de l’underground. Penses-tu qu’il est possible aujourd’hui d’être aussi transgressif en musique qu’il l’était en art ?

— Dans le présent, on ne retrouve aucune trace de Russolo ou de Duchamp.

Aujourd’hui, il n’y a plus de transgression, car elle est remplacée par la conformité. Nous sommes à l’ère de la mondialisation.

En fait, pour comprendre le présent, il faut parler de Warhol. S’il n’y a plus de transgression ou d’underground, il faut chercher la réponse dans ses mots.

La transgression n’est plus une forme d’avant-garde… dans les années 90, nous pouvions transgresser à travers notre musique ! On a été les derniers artistes de la transgression ! Puis la culture de masse a tué la graine de la transgression et le conformisme a pris place !

J’ai étudié l’histoire de l’art au lycée. En étudiant Russolo, Duchamp, Warhol, j’ai forgé mon propre point de vue. Je suis tombé amoureux de Russolo, j’ai été attiré par les mots de Duchamp. J’ai toujours déclaré que Duchamp avait été le premier à me montrer le concept du mot Underground… Mais pour être honnête, c’était jusqu’à ce que je connaisse le punk ! Avec ce concept, Duchamp a créé un lobby, un mouvement élitiste ! Le punk a brisé les mots et mon intérêt pour Duchamp ! Le Punk m’a montré la voie de la libre expression et m’a fait découvrir la vraie voie de l’underground et de l’artiste indépendant ! Le punk a laissé un héritage tangible dans la façon de concevoir l’art et la musique, en les libérant de leur dimension élitiste et en les rendant accessibles à tous.

Warhol, que je détestais, m’a immédiatement donné une vision lucide de notre avenir.

Si nous devons parler du présent/futur, nous devrions parler du fils du capitalisme « Mesdames et Messieurs Andy Warhol » ! Il a soutenu que l’art devrait être consommé et vendu au supermarché et qu’au lieu de créer, nous devrions communiquer ! Il était l’image du présent !

La musique et l’art ont perdu le pouvoir de déferler, de précéder, d’expérimenter et donc de transgresser. La seule transgression qui existe encore se retrouve seulement chez le citoyen moderne qui transgresse les canons d’une société obsolète et conservatrice et se dépouille de toute identification, de tout genre et de toute appartenance !

Mais la musique a perdu de sa valeur et l’art est MORT !

Le dernier disque que j’ai produit avec Crystal Geometry (Max Und Max) est récemment sorti sur Sonic Groove ! Dans l’information de presse, on déclare précisément ça : LE DIVERTISSEMENT S’EST PROSTITUÉ ET L’ARGENT A TUÉ L’ART !

Aujourd’hui, une transgression signifierait refuser tout réseau social ! Russolo ou Duchamp le feraient, mais l’esprit de Warhol semble avoir triomphé !

— Comment et quand as-tu découvert que tu voulais être DJ ?

— (C’est la vie qui m’a conduit à devenir DJ).

Chaque fois que je me suis retrouvé devant un DJ, j’étais hypnotisé ! Le scratching m’a amené aux platines, et à partir de là, j’ai réalisé que je voulais manipuler la musique. Je ne voulais pas l’écouter, je voulais la créer, la toucher, la changer…

En 1985, la mort prématurée de ma mère a été l’étincelle ! Je me suis enfermé deux ans dans ma chambre et j’ai commencé à pratiquer l’art du DJing comme thérapie. J’étais très en colère contre la vie. Je n’allais plus à l’école, j’ai abandonné le sport et tout ce qui m’entourait ! Mais j’ai transformé ma colère en énergie pure ! En 1987, je me suis produit dans mon premier club. Je suis devenu résident, puis je suis parti à Londres, je suis revenu. En 1990, j’ai créé la Warehouse et en 1991, l’une des plus importantes raves italiennes.

Enfin, en 1992, j’ai créé le premier groupe de musique techno industrielle ! (Automatic Sound Unlimited)

C’est ma mission depuis 1987.

— Tu as dit que l’un des DJ qui t’a inspiré était Marco Trani. Qu’as-tu appris de lui ?

— À être moi-même.

— Dans les années 80, tu as commencé à faire du graffiti, du breakdance et du scratch. Tu t’intéressais à la culture hip-hop ou simplement à l’electro ?

— La culture hip-hop et le street art m’ont beaucoup appris ! Cette culture m’a en fait conduit à devenir DJ.

Si je n’étais pas tombé amoureux du scratching, je ne serais pas DJ !

J’ai commencé par le scratching puis j’ai décidé de devenir DJ, mais l’electro m’appartient sans aucun doute, car j’ai produit et joué ce genre !

— Comment était la Rome des années où tu as commencé ta carrière de DJ ?

— Une Rome qui s’enorgueillissait d’une grande écurie de DJ depuis les années 1970 ! Dans les années 80, Rome était la capitale de la culture italienne des clubs ! Rome a donné naissance aux meilleurs DJ depuis les premiers jours ! J’ai beaucoup hérité d’eux et suivi les traces de nombreux DJ des années 80 qui m’ont montré la créativité et une technique raffinée aux platines !

— Quel genre de musique était populaire ?

L’Italo Disco (que je trouve intéressant), l’Italo House, le Disco et la Pop.

C’EST PAS POUR MOI😂😈

En fait, j’avais l’habitude de jouer de l’electro et de l’EBM.

Puis dans les années 90, nous avons tout cassé avec l’avènement de la rave, nous avons tué la « culture club » ! On a provoqué un véritable séisme !

J’en suis très fier. Dans les années 90, Rome était la capitale de la meilleure rave italienne et des artistes de génie y sont nés. Nous parlons beaucoup de Detroit, mais pour comprendre l’évolution de la techno et les racines de la techno industrielle, je te suggère d’aller fouiller dans nos productions. Rome a été fondamentale pour la mutation de la techno !

— Comment as-tu découvert la musique industrielle ?

-Par SPK, Throbbing Gristle, SUICIDE, Einstürzende Neubauten… Étant né en 1970, j’ai eu la chance de grandir alors que la musique évoluait. En plus, grâce à mon frère qui m’a emmené avec lui, j’ai vécu une deuxième vie !

— Comment étaient les premières raves auxquelles tu as assisté ? De nos jours, toutes les fêtes sont appelées rave, mais comment décrirais-tu l’esprit des originales ?

— C’était à Londres, en 1989/1990… la véritable révolution après avoir participé à l’Acid Party, les premières raves ont été une véritable révélation pour moi, je découvrais la carte de mon avenir ! D’immenses entrepôts industriels, des couleurs, de nouveaux sons, de nouveaux codes, de nouvelles idées ! Ça a été une véritable explosion d’émotions ! 

Si nous devons parler de la rave, nous devons parler de la techno, car tout vient de là !

La rave est née parce que nous, les DJ, avions besoin de jouer notre propre techno.

Quand Margaret Thatcher a interdit les acid parties en Angleterre en 1989, la révolution est née et les DJ orphelins des acid parties ont donné naissance à la rave.

Nous parlons de 1989/90. Ensuite, Thatcher est entrée en scène en 1994 en interdisant les rave. L’Angleterre a adopté la loi qui interdisait l’organisation d’une rave, alors la FREE ZONE est née (que certains appellent de façon erronée la rave illégale). Les voyageurs sont devenus des ravers et ainsi sont nées les tribus, les free parties et la T. A. Z. En 1995, la Rave est devenue un phénomène social. À l’époque, c’était un refuge, mais la rave est devenue une zone où le social était au premier plan, où justement le modèle de l’autogestion du mouvement punk était fondamental.

En 1994/95, l’émergence de la culture post-rave (FREE PARTIES) se situe parmi les expériences contre-culturelles et les pratiques libertaires qui se développent en Angleterre en opposition au gouvernement conservateur de Margaret Thatcher : squatters, voyageurs et post-ravers composent une constellation mobile aux contours indéfinis qui exprime, sous diverses formes, le conflit ou l’éloignement des valeurs et des normes imposées par le nouvel ordre du libéralisme économique. Le front de la résistance est plutôt en dents de scie avec des modes de lutte et de protestation qui se déploient des codes de subversion symbolique aux actions d’antagonisme politique.

Il faut rechercher les racines de la Rave et de la Techno dans d’autres domaines que ceux qui t’ont toujours été enseignés !

LA TECHNO EST LA FILLE DU PUNK ! [Max Durante].                                            

J’ai écrit cette phrase il y a de nombreuses années. J’en suis fier, car en 1990, avec l’avènement et l’évolution de la technologie, nous avons eu l’occasion de créer le punk du futur ! C’est ce que nous avons appelé TECHNO ! La culture rave a hérité de la philosophie du Punk des années 70, et en a tiré la liberté d’expression, l’anarchie et la culture DIY !

Les DJ, en tant que non-musiciens, ont créé une nouvelle expression musicale en héritant de la puissance expressive du Punk.

La techno est née comme un signe de protestation ! C’était un manifeste de la sous-culture. Une expression, une forme de révolte ! Mais à l’origine, c’est le DJ qui a créé la rave, puis 4 ans plus tard, elle a été reprise par les anarchistes et les activistes !

Aujourd’hui, la TECHNO se fait violer par la culture de masse !

Les nouvelles générations voient la rave et surtout la techno comme quelque chose de différent de ce que l’origine représente, nous ne parlons plus de sous-culture !

RAVE SIGNIFIE DÉLIRE, DÉLIRE ÉMOTIONNEL, ENTRER EN EXTASE À CAUSE DU PLAISIR, PAS UN DÉLIRE COMPRIS COMME LE CHAOS ! (Rome, 1993 – Max Durante)

« Ce qui a rendu l’âge de la rave magique, c’est le concept d’abattre le mur du son, le besoin de grands espaces, l’évasion des clubs. La rave était le village d’une société moderne. Nous étions une tribu avec un credo unique, la techno et la danse. Chaque week-end, les gens attendaient la rave comme s’il s’agissait d’un rituel, d’une cérémonie. C’est pourquoi les années 90 ont généré tant de magie et d’énergie. »

La rave de l’ère moderne agit comme un autorégulateur des complexités psycho mentales d’une communauté.

La rave devient aujourd’hui un nouveau monde auquel s’identifier ! Où la musique techno agit comme un catalyseur dans une société orpheline d’évolution sociale ! (Berlin, 2021 – Max Durante)

La grande différence, c’est qu’avant nous étions sérieux. À présent, tout tourne autour des SELFIE à mettre sur les réseaux sociaux ! Une bataille perdue dans un monde qui a plutôt besoin d’une vraie révolte et de mettre le système à genoux comme nous l’avons fait en 1990. 😈

Tout d’abord, la rave n’existe plus. Maintenant, n’importe quelle fête est qualifiée de rave… mais nous en sommes très loin… l’esprit a changé, tous les jeunes s’habillent de la même façon, ils ne sont plus libres mentalement comme nous l’étions.

Nous avons perdu la liberté de nous exprimer, d’être différents des autres. Les jeunes ont besoin qu’on les secoue. Ils ont besoin de plus de personnalité, de plus de courage !!! 

Ils ont probablement hérité de la rave le désir de partager et de rester 24 heures à danser sans arrêt… mais nous avons malheureusement perdu la véritable essence.

— Avec les frères D’Arcangelo, tu as organisé la première rave PLUS 8. Dans quelle mesure ces fêtes italiennes étaient-elles différentes de celles que tu as vécues au Royaume-Uni ?

— Nous n’avons pas organisé la première PLUS 8 ! Nous avons organisé la plus importante RAVE italienne. Elle était appelée Plus 8, car c’était la vitrine des disques Plus 8.

Nous avons apporté la différence en concentrant la rave exclusivement sur la musique techno.

À Londres, dans les premières raves, on commençait par le hip-hop, puis le break beats, le jungle, le hardcore britannique et les premières productions de techno et d’acid house.

Le hardcore britannique le plus joué est très différent de son homonyme néerlandais ou continental.

Pour le comprendre, le UK Hardcore est le son des premières productions de Prodigy !

— Que peux-tu nous dire d’Automatic Sound Unlimited ? Comment as-tu eu l’idée de créer ce projet ?

— Automatic Sound Unlimited est né au moment où nous avons organisé la Plus 8 Rave !

Plus qu’une idée, c’était une mission ! Nous voulions créer la plus importante rave italienne et chaque fois que nous nous sommes réunis pour organiser la rave, à la fin, on s’enfermait dans un studio pour expérimenter de nouvelles théories sonores. On voulait créer la musique qui serait la bande-son de la rave et nous avons réussi !

Nous parlons des années 1990 où la répression, le mondialisme et le capitalisme nous ont frappés comme un ouragan. La rave était un excellent véhicule pour désobéir aux propriétaires du monde !

En tant qu’artistes du mouvement rave/techno, nous avons pensé à créer la musique de la phase moderne et post-moderne.

NOUS AURIONS PU SUIVRE LES TRACES DE LA TECHNO DE DETROIT, MAIS EN FAIT, LA NÔTRE VOULAIT DÉFRAGMENTER LA TECHNO ET NOUS AVONS DONC CRÉÉ LA TECHNO INDUSTRIELLE !  [AUTOMATIC SOUND UNLIMITED, 1992]

Avec notre vision, nous avons accéléré la mutation de la techno !

— Tu as sorti ton premier EP en 2001, intitulé Human Turntable EP, où tu reviens à tes racines electro. Tu as collaboré les années suivantes avec certaines des grandes nouveautés du style comme Aux88 et Anthony Rother. Ça te faisait quoi, de faire partie de cette scène ?

— J’ai composé mes premiers disques en 1992 sous le nom d’Automatic Sound Unlimited ! En 1995, pour la première fois, j’ai utilisé mon nom Max Durante pour le morceau « The Prisoners Clank their Chains » pour Plasmek records.

Puis j’ai commencé à produire de l’electro sous le nom de Prodamkey Crew ! Depuis 2000, j’ai décidé de signer toutes mes productions uniquement avec mon nom Max Durante !

La scène electro m’a accueilli à bras ouverts. Je faisais partie de la première scène electro des années 90, on formait une super équipe et beaucoup d’entre eux réclament mon retour ! Anthony Rother m’a dit plusieurs fois qu’il s’attendait à m’entendre jouer de l’electro une fois sur HÖR.

J’ai produit quelques disques avec Keith Tucker et avec Anthony Rother. J’ai produit une immensité d’electro sur de nombreux labels et beaucoup sur mes anciens net labels. Mais impossible de remettre la main dessus ! J’aime ça, car ça me donne l’envie de les refaire, surtout les productions que j’ai signées en tant qu’ELECTRO PUNISHER. D’ailleurs, je pense aussi recommencer à faire des DJ SET sous mon pseudo ELECTRO PUNISHER.

C’était comme une famille ! La scène electro est plus unie que celle de la techno, mais a des affinités d’élite. Si tu sors des canons de la composition, tu sors du son electro typique. Du coup, ils te disent que ce n’est pas de l’electro !

Anthony et Keith sont de bons amis et avec Keith Tucker (DJ K1/AUX 88), nous avons produit un autre nouveau disque d’electro qui sortira bientôt !

Avec eux, j’ai apporté force et innovation à la scène electro !

—Que peux-tu nous dire de ton premier LP, The Experiment ? C’était aussi l’une de tes œuvres les plus expérimentales jusqu’à cette date.

— En fait, j’ai atteint des sommets d’expérimentation bien avant The Experiment.

Avec The Experiment, je réalise que mon âme n’appartient à aucun genre musical, c’est la récolte de mon expérience dans la vie ! Le disque ne présentait pas de vrais titres et aucune illustration, seulement la couleur grise ! Je l’ai appelé The Experiment, non pas à cause du son, mais de sa présentation. J’ai donc donné de la force à la musique et non à l’image !

Il faut rechercher mes influences musicales dans l’art et non dans la musique.

— Tes derniers EP, Order and Chaos et Fear and Desire étaient censés sortir sous forme d’un album complet, mais tu as décidé de les séparer, n’est-ce pas ? Quelle était l’idée générale de cet album ? Que comptes-tu faire à présent ?

— J’ai fait écouter les 8 pistes à Philipp Strobel. Il a été immédiatement impressionné ! J’avais proposé l’idée d’un LP parce que, selon moi, il racontait une histoire. Mais Philipp m’a fait raisonner en disant que j’apportais un nouveau son à aufnahme+wiedergabe, et que deux EP permettraient d’apporter une continuité au son. Je ne savais pas comment les qualifier ce jour-là, mais quelques années plus tard, j’ai trouvé le nom : dub EBM ! Il m’a dit que ces deux EP étaient puissants et que « Religion against Religion » serait le hit du premier EP. C’est ce qui s’est passé, tout le monde voulait jouer ce morceau ! Deux femmes DJ que je ne nommerai pas ici se sont disputées pour savoir qui devait le passer en premier. J’en étais vraiment heureux.

Sur le plan conceptuel, j’ai précédé ce que nous avons vécu dans le pré et le post-Covid. Les EP représentent ce que nous avons vécu pendant la pandémie, un chaos généré dans un faux ordre et la peur et le désir d’échapper à la manipulation mentale. En 1979, aux États-Unis, ils ont expérimenté la manipulation mentale, ce qui a fait des morts. Beaucoup de gens ont été utilisés pour faire leurs expériences et sont devenus malades mentaux. Bien sûr j’ai été inspiré par ça et je n’avais aucune idée qu’on serait dans cette situation pour de vrai !

D’un point de vue sonore, c’est une fusion de techno industrielle et de dub EBM !

Dans ce nouvel ordre, le système a changé et le lobby nous emmène dans le Metaverse (nouvel ordre à exécuter), parce qu’on deviendrait aussi virtuellement leurs esclaves et numériquement, ils nous bombarderont et nous laveront le cerveau avec un clic. On pourra aussi acheter le BONHEUR VIRTUEL ! Aah !!! On est dans la merde ! Bienvenue dans la dystopie mentale, la mémoire numérique de la jungle du capitalisme ! On serait prisonniers d’un pixel qui portera notre ADN !

— Ta musique a aussi quelques influences EBM. Comment vois-tu le style aujourd’hui, avec tant de producteurs qui y reviennent ?

— C’est évidemment le son que je mixais en 1987 !

J’avais l’habitude de mixer de l’electro, de l’EBM et du Brooklyn freestyle. Ce qui me rendait fou, c’était la puissance du snare qui s’appelait FAT SNARE ! J’ai d’ailleurs réutilisé ça dans mes productions (par exemple « Religion against Religion » sur aufnahme+wiedergabe)

Je vais te dire ce que je pense vraiment de la nouvelle scène EBM : elle est ennuyeuse, mais il y a beaucoup de productions intéressantes que j’aime, surtout celles qui sont allées plus loin !

Le problème est qu’au début, tout le monde a commencé à cloner le son de aufnahme+wiedergabe ; tout le monde a commencé à cloner Phase Fatale, Schwefelgelb et ainsi de suite ! À un moment donné, tout le monde avait le même son !

Je n’aime pas les cliques, je ne peux pas rester confiné c’est pourquoi j’ai aussi arrêté l’electro, car ce sont des genres qui sont faits pour rester coincés dans leurs canons !

C’est pourquoi je ne joue plus d’EBM, car maintenant, il est évident pour mes oreilles que c’est le son avec lequel j’ai commencé ! J’ai recréé ma propre vision de l’EBM en soustrayant la synthèse mélodique et la ligne de basse. J’ai créé le dub EBM qui sont les productions que j’ai signées sur a+w.

L’EBM peut évoluer avec une touche moderne. À mon avis, Ancient Methods a réussi à le faire.

— Durant la pandémie, tu as créé Dead on Monday sur HÖR avec Philipp Strobel. Ça t’a-t-il aidé à mieux gérer la situation ?

— En réalité, le programme est né avant la pandémie. Peu de temps après, la pandémie a éclaté ! C’était l’une de mes visions quand on était en pleine pandémie, et on l’a transformée temporairement en WE ARE STILL ALIVE. Il faut reconnaître qu’on était des génies !!! Ça a été une véritable explosion d’idées pour tout le monde. Nous avons créé un programme qui est devenu une icône et on a servi de remède pendant la pandémie ! J’ai commencé à jouer à HÖR à partir du 12 septembre 2019 et nous avons commencé « Dead on Monday » en février 2020. On a sans aucun doute aidé à diffuser la radio dans le monde entier ! On a connu un succès incroyable. Ces deux années m’ont beaucoup apporté et on a beaucoup apporté à la radio et au monde. C’était les débuts de HÖR. Nous avons contribué à leur croissance, c’était un échange d’énergies ! Nous avons apporté à HÖR ce qui lui manque encore aujourd’hui : de la culture, du talent et de la substance. C’est moi qui ai été le premier à porter la cagoule à HÖR ; j’ai inspiré beaucoup de gens, MAIS JE SUIS LE DJ ORIGINAL DE LA CAGOULE et tout le monde a commencé à m’imiter ! C’était tellement drôle, le monde entier nous regardait et maintenant le monde entier porte des cagoules, du hip-hop à la techno. C’est devenu à la mode, j’ai mis tout le monde en ébullition, j’ai contaminé le monde !

On est dans la période la plus fertile du narcissisme et du faux protagoniste. J’essaie d’inspirer les jeunes avec du contenu et en leur donnant la motivation d’aller à contre-courant.

Chacun est libre de faire ce qu’il veut. J’essaie d’inspirer les gens et je porte le masque parce que j’accorde de l’importance à ma musique, pas à ma silhouette !

Enfin bref… Je parlais de HÖR et… en 2019, j’étais très enthousiaste à l’idée de me produire à HÖR. Au départ, je les ai aidés à faire participer d’autres DJ, en parlant à la scène. Puis j’ai présenté mon idée à Philipp et dès que je lui ai dit le nom que j’avais en tête, Dead on Monday, il est immédiatement tombé amoureux du concept. Nous avons été les premiers résidents et tous les autres ont suivi.

— Qu’est-ce qui s’est passé avec ton projet de camp de DJ ? Des nouvelles ?

— Trop d’efforts, je voulais le faire dans le monde entier, mais ce Covid a dessiné un nouveau monde !

Il est encore trop tôt pour m’exprimer à ce sujet, mais je vais créer quelque chose de très intéressant ici à Berlin.

— Au moment où j’écris cette interview, l’extrême droite a remporté les élections en Italie. Qu’en penses-tu ?

— Je ne suis pas la personne indiquée pour répondre à cette question ! J’ai quitté l’Italie il y a de nombreuses années parce que sinon, j’aurais mis un pistolet sur la tête du Pape et du Président du Sénat ! L’Italie est forgée dans la corruption chronique qui se cache parmi les dogmes de l’église et de la politique ! J’aime l’Italie, mais je la déteste également. Je me suis échappé de là-bas, c’est une prison !

— L’année dernière, tu as sorti un album sur Hands, intitulé Der Graue Geruch Nach Metall. La musique pourrait plutôt être décrite comme du rhythm noise, le style pour lequel le label est célèbre. Qu’est-ce qui t’a poussé à prendre cette direction ?

— En fait, le disque n’est pas rhythm noise, peut-être que mon dub EBM est trompeur. Il y a des morceaux d’electro, un morceau de cold/minimal wave, des morceaux de techno industrielle (que de nombreux critiques ne reconnaissent pas) et il y a même du dub EBM ! Comme je l’ai déjà expliqué, cela peut prêter à confusion et amener le critique à l’appeler rhythm noise.

C’est ma façon habituelle de composer, où je donne la priorité et la force au rythme et j’enroule les sons autour du rythme.

Si tu écoutes le premier EP que j’ai produit pour a+w, le son est très similaire.

Après avoir donné les deux EP à a+w, j’ai immédiatement conçu ce LP parce que je voulais en construire un. C’est une continuation de Order and Chaos, parce que je parle de corruption, de consumérisme. Ce disque parle aussi de COVID et de la fin du monde (les titres sont en allemand que beaucoup de gens ne connaissent pas, mais les titres parlent de ça !) Dans la musique, il y a des phrases allemandes qui ramènent à la fin du monde ou des phrases anglaises qui parlent de la nouvelle génération du nouvel ordre ! C’est un autre disque que j’ai produit à la fin de 2019 avant la pandémie et le disque est sorti deux ans plus tard, en 2022, justement à cause de la pandémie !

Plus qu’un disque, c’est un livre à lire avec tes oreilles, à écouter attentivement !                    

C’est une expérimentation qui m’a conduit à minimiser pour optimiser, en utilisant l’arrangement typique de la techno dans lequel nous travaillons sur les couches sonores afin que la répétition cyclique fasse du son un motif rythmique encensant !

— Tu as créé deux labels, Prodamkey et Analog Dust. Comment décrirais-tu l’expérience ? Le vinyle étant de nouveau populaire, tu n’as pas envie d’en créer un nouveau ?

— L’analyse de l’expérience pourrait être résumée en disant : soit tu es DJ, soit tu diriges un label !

Maintenant, c’est un jeu, tu ouvres Bandcamp et tu crées ton propre label ! Dans le passé, ce n’était pas si facile et puis les vinyles se vendaient vraiment, il fallait suivre le rythme !

Par exemple, Prodamkey est né en 1998. J’ai composé le premier album sur vinyle qui s’est vendu, mais après, je n’avais plus le temps.

Puis il y a eu la crise du vinyle vers 2004 ! J’ai continué Prodamkey en numérique, ce qu’on appelait les net labels à l’époque, puis j’ai aussi créé Analog Dust pour contrer l’avènement de la tech house, de la techno minimale, de la deep house, toutes ces demi-mesures, cette fausse techno ! Analog Dust avait une touche techno des années 90…

Honnêtement, j’ai continué un peu les net labels, puis je les ai arrêtés.

Beatport ne paie pas et l’autre ne te donne que des miettes. Puis arrive ce qui est en vogue aujourd’hui : on n’achète plus ou on ne télécharge plus. On écoute les morceaux en streaming, et l’artiste reçoit pas un centime.

J’aimerais créer quelque chose de différent… mais il est trop tôt pour en parler.

—Que peut-on attendre de Max Durante, à l’avenir ?

— JE SUIS L’AVENIR.

— Quel genre de set prépares-tu pour l’Ombra ?

— Je ne prépare jamais mes sets, je vais au gré des humeurs, nul doute que je serai puissant, brut, sans compromis ni cliques habituelles ! Pas de numérique, seulement du vinyle. J’aurai l’honneur de faire le set de clôture du samedi et c’est ma spécialité : je t’emmènerai dans des endroits infinis et tu n’auras aucune échappatoire entre la distorsion et la pression sonore. Le public sera prisonnier de mon schéma rythmique, je puerai l’industrie et je représenterai la décadence du monde avec mon son !

Je serai ton PUNISSEUR ! 

 

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