Pour ceux qui sont tombés amoureux de la synthpop grâce aux chansons de Blancmange comme « Waves », nous avons eu la bonne surprise de voir qu’ils revenaient en force en 2011 avec un nouvel album. Depuis, ils ont dépassé toutes nos attentes avec chaque disque qu’ils ont sorti. Nous avons parlé avec Neil Arthur de l’histoire du groupe, qui jouera le 24 mai au W-Fest.
—Pourquoi avoir choisi un nom comme Blancmange (un dessert français) pour le groupe ? Le dessert a été mis en avant dans quelques reprises du groupe.
—Il nous fallait un nom rapidement, quelque chose qui n’ait l’air de rien, sans importance.
—La musique du premier 7″, Irene and Mavis, est plus expérimentale, et les premières démos de Happy Families également. Comment se fait-il que tu aies changé pour de la musique un peu plus synthpop par la suite ?
—Ça s’est passé sur une période 4 ans pendant laquelle, au départ, on pouvait se payer des synthétiseurs ou simplement y avoir accès, alors on a fait avec ce qu’on avait sous la main.
—L’année dernière, on a pu interviewer Minimal Compact, pionniers dans l’utilisation des influences orientales dans la musique pop. Blancmange aussi s’est servi de tablas et de sitar dans le single « Living on the Ceiling », et d’influences orientales dans des chansons comme « Vishnu ». Comment vous est venue l’idée d’inclure ces sonorités dans votre musique ? J’imagine que la musique orientale vous intéressait tous les deux, si on se rapporte à d’autres projets que vous avez ?
—On a écouté beaucoup de styles de musique différents, d’un peu partout dans le monde, parfois sur des stations radio à ondes courtes, et on y a piqué des idées, j’imagine. On a ajouté le sitar et les tablas sur « Living on the Ceiling » suite à une erreur de ma part à la guitare qui a involontairement créé une mélodie, avec une petite touche du Moyen-Orient. Ce n’est que bien plus tard que notre maison de disque l’a écoutée, puis nous a présentés à Deepak et Dinesh, respectivement au sitar et aux tablas. Ils n’ont pas cessé d’améliorer ce qu’on avait déjà enregistré.
—Le second album du groupe, Mange Tout, comporte cette célèbre reprise d’Abba qui, selon Wikipédia, a eu encore plus de succès que l’original (au Royaume-Uni tout du moins). Qu’est-ce qui te plaisait chez le groupe suédois ? Dirais-tu que c’est une référence pour toi ?
—J’adorais, et j’adore toujours Abba. Ce n’était pas le cas de tout le monde en 1983.
—Pendant ton séjour à New York, tu avais l’habitude d’aller au Paradise Garage de Larry Levan. Comment décrirais-tu ton expérience dans un endroit si légendaire ? Étais-tu intéressé par la disco et la musique house ?
—J’ai eu quelques soirées et petits matins intéressants à New York.
—Que s’est-il passé avec Pandit Dinesh, le joueur de tabla qui était à l’époque le troisième membre non officiel de Blancmange ?
—On est toujours très bons amis, Dinesh et moi. Il a joué sur Blanc Burn, l’album de Blancmange sorti en 2011, et il a fait la tournée de promotion avec nous. C’est un homme très occupé, un artiste formidable.
—Que s’est-il passé avec la vidéo de « Lose your Love » de l’album Believe You Me ? Tu as dit qu’elle a été censurée dès la première vue (prétendument pour incitation à la violence). Qui a eu l’idée de cette vidéo ?
—C’est Zbig Rybczynski, le réalisateur, qui a eu l’idée. Et oui, il n’y a eu qu’une seule vue au Royaume-Uni avant qu’elle ne soit censurée. La vidéo la plus chère qu’on n’ait jamais faite. On peut en voir des extraits dans le film Flight of the Navigator. Au moins, Disney l’a acceptée.
—C’était quoi la West India Compagny ? Un groupe formé par Stephen ? Tu apparais en tant que membre dans Discogs, avec Vince Clarke. Tu peux nous en dire plus à ce propos ?
—C’était le projet de Stephen et Dinesh, et Vince m’a invité à y contribuer, au fur et à mesure.
—Le fait qu’un groupe s’arrête afin de sauver l’amitié entre ses membres est quelque chose d’unique dans un monde où même les groupes les plus punk se séparent pour des raisons de royalties, tu ne crois pas ?
—Ça a été comme ça pour nous. Je ne peux pas parler pour les autres.
—Une fois le groupe séparé, tu as sorti un album solo, Suitcase (en 1994). Quels souvenirs as-tu de ce travail ?
—C’était génial d’enregistrer avec Adam Fuest, et plutôt bizarre d’être avec un autre label.
—Tu as composé des musiques de film et pour la télévision. Peux-tu nous en dire plus ?
—À partir de 1989 environ, et jusque récemment, j’ai composé pour un certain nombre de productions télévisuelles et de films. C’était super ! Pas de photos, pas d’interviews, pas de tournées. (rires)
—De quoi parle la chanson « By the Bus Stop @ Woolies » ?
—« By the Bus stop @ Woolies » est une chanson dont l’histoire se déroule dans ma ville natale. Ça parle d’une relation amoureuse fictive.
—Je pense que « Don’t forget your teeth » (ndt : n’oublie pas tes dents) est un nom incroyable pour une chanson, mais ce titre existe sur la face B de Right Here, Right Now, de Fat Boy Slim. Tu connaissais cette chanson ?
—Merci, ça nous a fait bien rire. Sinon, non, je ne la connaissais pas.
—Pourquoi as-tu choisi de refaire également les chansons de ton premier album dans Happy Families ?
—On m’avait demandé de faire une tournée, soi-disant d’« album classique » avec Happy Families. Je voulais avoir la possibilité d’offrir quelque chose de nouveau aux fans qui venaient voir les concerts, du coup je me suis mis à réimaginer l’album.
—Dans Semi Detached, on retrouve une reprise de « I want more », de Can, ainsi que des influences de Neu ! dans certaines chansons de Commuter 23. Etais-tu intéressé par le Krautrock ou la musique électronique allemande des années 70 ? Pourquoi as-tu choisi cette chanson de Can ?
—C’est simple : j’adore Can et Neu!. Ces groupes sont de très grosses références pour moi.
—Semi Detached est le premier album sans Stephen. C’était comment de travailler seul ?
—Ça a été. Je lui ai envoyé une copie et il l’a aimée, et m’a donné le feu vert.
—Nil by mouth a été ton premier album instrumental. Dirais-tu qu’il a été influencé par ton travail sur les bandes-son ou plutôt par tes premières créations ?
—Je dirais un peu des deux, et le soulagement de ne pas avoir à chanter ou à trouver des paroles.
—Commuter 23 a été une autre aventure sonore. Te mets-tu des limites à ne pas dépasser avec Blancmange, ou veux-tu tout essayer ?
—Il y a des limites, mais de manière générale, je m’en tiendrais vaguement à l’électronique.
—Unfinished Rooms était le premier album avec Benge. C’est comment de travailler avec lui sur les chansons de Blancmange ?
—Pour un album qui a été décrit comme sombre, on a beaucoup ri en le composant. C’est quelqu’un de super avec qui travailler.
—Est-ce que le dernier album du groupe, Nil by mouth II, a été fait comme une continuité du premier, ou tu avais juste des instrus à sortir ?
—Je dois dire que j’avais effectivement planifié une suite.
—Comment va Stephen ? Il est malade depuis vraiment longtemps maintenant, non ?
—Oui, c’est malheureusement le cas. On est en contact régulièrement.
—J’imagine que tu dois être très occupé, entre Fader (le premier projet sur lequel tu as travaillé avec Benge, et dont un album est sorti en 2019), et Near Future. L’année dernière, tu as également joué avec Kincaid. C’est ton fils, n’est-ce pas ? Peux-tu nous en dire un peu plus sur ces projets ?
—Oui, on a déjà 2 albums de sortis avec Fader, et je suis sûr qu’il y en aura un 3e. Avec Jez Bernholz, on travaille sur le prochain album de Near Future, et avec mon fils Joe, alias Kincaid, on est en train d’écrire plus de matériel qui sortira en 2021.
—Comment s’annonce ton concert au W-Fest ? Plutôt expérimental ou focus sur des hits ?
—Je crois qu’on va jouer des chansons du nouvel album Mindset (qui sort en Mai), en même temps que des chansons des années 1980 et des plus récentes. Merci.
Traduction : Emmanuelle Ambert