Inicio » Interviews » Interview: Maman Küsters

Interview: Maman Küsters

par François Zappa

Maman Küsters, comme ils le prouvent dans cette interview, est l’un des groupes les plus personnels de la scène EBM. Avec seulement deux albums sortis sur l’excellent label Unknown Pleasures, ils ont réussi à améliorer le style, parfois un peu conservateur, de l’Electronic Body Music. C’est l’un des groupes que nous avons le plus envie de voir à l’Ombra Festival, qui aura lieu à Barcelone du 24 au 27 novembre. Maman Küsters nous emmènera au ciel.

– Le nom du groupe vient de « Maman Küsters s’en va au ciel », un film de Fassbinder. Pourquoi avoir choisi ce nom ? Vous partagiez les valeurs du film ou bien vous en aimiez la sonorité ?

-Cyril : La chaîne Arte avait diffusé « Mother Kusters Goes to Heaven » la veille. Si on avait regardé France 3, on aurait choisi « Le petit baigneur » ou « La panthère rose »… Inutile de chercher plus loin. Bien sûr, tout le monde s’accordera à dire que c’est un super nom !

– Gaël, tu as organisé les Douches électriques, des événements pluri-artistiques où tu mélangeais électronique, danse et installations. Ont-ils influencé la création du groupe ?

– Gaël : Oui, ces événements étaient de grands terrains de jeu. On a mis en application beaucoup d’idées musicales à cette époque.

– Le groupe s’est lancé en 2004, non ? Mais vous n’avez rien publié avant 2011. Comment décririez-vous ces premières années ?

-Cyril : Les années étaient remplies de 365 jours, sauf s’il y avait une année bissextile ! C’était de belles années.

– Gaël : On a essayé de trouver un label, sans succès. On a continué à enregistrer et on s’est beaucoup amusés à composer des morceaux.

– Vous devez avoir une bonne relation avec Christophe Mevel puisque Cyril a travaillé avec lui dans quelques projets et toi Gaël dans deux autres, Dale Cooper Quartet et Tank. Comment est née cette collaboration ? Faisait-il partie du groupe au début ? Il a joué dans certaines chansons du premier album.

– Gaël : Oui, on connaît Christophe depuis très longtemps. Pour les premiers titres de MK, il chantait avec Cyril et moi j’étais aux machines.

– Pourquoi avoir choisi l’EBM pour communiquer vos idées ?

-Cyril : Maman Küsters fait de l’EBM.  Tous les styles musicaux sont intéressants.

– Gaël : Pour nous, c’était naturel de composer de l’EBM ; c’était notre terrain d’entente en matière de style musical.

– Quels artistes ont influencé votre son ? J’ai retrouvé des mentions à D.A.F. et Liaisons dangereuses, ainsi qu’à la Neu Deutsch Welle.

– Gaël : Oui, bien sûr, ce sont des influences très importantes. Nous avons beaucoup de respect pour leur musique et la façon dont ils composaient, sans ordinateurs.

– Vous avez fait du studio pour la première fois pour enregistrer votre premier EP, L’Alpiniste. Comment avez-vous vécu cette expérience ? Vous saviez déjà exactement quel son vous recherchiez pour Maman Küsters ?

-Cyril :On avait tous deux des piolets, des mousquetons, et des chaussures à crampons. Gaël avait un bonnet chaud et moi aussi. Impossible de choper froid. L’écho résonnait sur les parois des montagnes.

– Gaël : Cyril s’occupe des paroles, et on regarde ce qu’elles donnent sur des pistes que j’ai composées. La plupart du temps on remplace la musique plus tard. Les paroles nous poussent vers de nouvelles voies musicales. On n’a pas de plans ni d’idées claires au début.

– Comment avez-vous rencontré Pedro Peñas Robles, de Unknown Pleasures ? En quoi a-t-il contribué à la musique de Maman Küsters ? Il a également chanté sur quelques-uns de vos titres, n’est-ce pas ?

– Gaël : Je suis fabricant de synthétiseurs/pédales, et j’ai dû réparer un module pour le grand Terence Fixmer.Je lui ai envoyé quelques-uns de nos morceaux et il les a transmis à Pedro… Encore merci Terence ! 🙂 J’ai eu le plaisir de rencontrer Terence IRL au printemps dernier.

Oui, Pedro chante parfois sur nos morceaux ! Et Franck Kartell nous donne aussi parfois un coup de main avec sa musique électro.

– Quelles sont vos sources d’inspiration pour les paroles ? Dans une critique, on vous a comparés avec Gainsbourg et Bashung. Pourriez-vous nous donner des noms d’auteurs qui vous ont inspirés ?

-Cyril : Les textes viennent tout seul, je n’y pense pas trop. Bien entendu, j’ai mes sources d’inspiration : les films, la littérature, etc. De Gainsbourg et Bashung à Richard Brautigan, tous les grands poètes ou écrivains chinois et japonais)

– Cyril, tu as déclaré que l’un des objectifs des textes est de faire rire. Utilises-tu l’humour comme un moyen de fuir la difficulté de la réalité ?

-Cyril : Pourquoi fuir les difficultés de la vie ?  Pourquoi ? Il n’y a rien à fuir. La vie est difficile et la vie est belle, c’est tout. Je ne suis pas nihiliste. Quant à l’humour, un proverbe japonais dit que « La durée d’une vie est toujours la même, qu’on passe à pleurer ou à rire.

– Le dadaïsme a été assez populaire dans la musique pop, de Cabaret Voltaire à Tom Waits. Selon vous, pourquoi ce mouvement artistique est-il toujours aussi pertinent aujourd’hui ?

-Cyril : Je n’ai aucune idée de ce qui est pertinent ou pas.

– Votre premier album, Sous la Peau de Maman Küsters (2016), a été bien accueilli par la critique. On y retrouve de nouvelles et d’anciennes chansons. A-t-il été difficile de lui donner une certaine cohésion ?

– Gaël : Pas du tout, c’est la voix et le débit de mots de Cyril qui assure toute sa cohésion.

– Que pouvez-vous nous dire à propos de Cherche querelle ? S’agissait-il seulement d’un album de remixes ?

– Gaël : Il s’agissait d’une sorte de version vinyle LP de nos titres avec quelques titres édités sur un label français (nos amis Christophe Mevel et Reno de Bad Seeds Recordings)

– Comme vous êtes brestois, est-ce que vous avez voulu faire blague avec le film/livre de Jean Genet de Fassbinder ?

-Cyril : Oui, c’était une blague, rien de plus.

– Gaël : Oui, un grand réalisateur, un grand film, une grande ville !

– Vos albums comportent des chansons en français et en allemand. Comment choisissez-vous la langue selon la chanson ?

-Cyril : Je ne sais pas. La langue s’impose d’elle-même. Français, allemand, italien, japonais…

– Dans vos albums, on trouve toujours de nouvelles versions de vieilles chansons. Préférez-vous voir vos compositions comme un travail en cours plutôt que de les considérer comme terminées ?

-Cyril : Je pense surtout qu’on se dit : « On va faire ceci ou cela, car on en a envie et que ça nous plaît ». On ne prévoit rien. On s’amuse, c’est tout.

– Gaël : Certaines compos sont terminées, d’autres évoluent en fonction de notre humeur du moment.

– Dans L’Extase Et La Terreur, vous avez travaillé avec Julia Bondar. Vous l’avez choisie parce que vous étiez sur le même label ?

– Gaël : Non, pas du tout, je connais Julia depuis longtemps, j’ai mixé et masterisé son premier album (In my neighbourhood) et je le fais toujours. J’ai envoyé certains de ses morceaux à Pedro et il voulait la signer pour un LP sur Unknown Pleasure Records.

– Nous allons également voir Chris Shape à l’Ombra. Que pensez-vous du remix qu’il a fait pour l’album ? Aimez-vous aussi son travail en solo ?

-Cyril : Le remix était sympa ; je ne connais pas son travail en solo.

– Gaël : Oui, on l’adore ! C’était un très bon remix, j’adore aussi son travail en solo.

– Cyril, avec ton projet HF90, tu as fait quelques reprises d’Étienne Daho, qui est d’ailleurs une influence pour votre duo. Qu’ajoute-t-il à votre son ? La partie chanson ?

-Cyril : Christophe Mevel et moi apprécions la musique et les paroles d’Étienne Daho. HF90 est un peu comme Maman Küsters. Certaines chansons remontent sont si vieilles que je ne sais pas quoi répondre à certaines questions. Comme tu peux le voir, d’ailleurs !

– Gaël, tu possèdes ta propre marque de pédales, Touellskouarn. Tu peux nous en parler ? Tu crées tes propres pédales, non ?

– Gaël : Oui, je fabrique des synthés modulaires et des pédales, au début c’était pour mon usage personnel, mais à présent, j’aime écouter la musique que les autres artistes composent avec mes instruments.

– Nous avons parlé des paroles, mais Cyril a également écrit un roman Démarre la jeep, et une compilation d’écrits intitulée BernaStrasse, Adoncques ainsi rouler skate. Tu peux en parler à nos lecteurs ?

-Cyril : « Démarre la jeep » sont des phrases qui se répondent jusqu’à former une histoire. On pourrait dire que c’est sous influence de « Tawara Machi / Richard Brautigan ». « Bernastrasse adoncques ainsi rouler skate » est de la poésie, comme des cartes postales de vacances. Ainsi que « Vide Adoré 1” et « Vide adoré 2” en guise de conclusion… un peu comme une trilogie poétique… Tout cela se trouve aux éditions Qazaq sur le site « Les cosaques des frontières » de Yan Kouton… Je n’ai rien d’autre de spécial à ajouter. Si les gens lisent ça et qu’ils aiment, si ça les fait sourire, c’est tant mieux. Je ne me soucie pas vraiment de la musique et de l’écriture, c’est bien, mais c’est pas le centre du monde.

– Cyril, avec ton AKA B Strasse 1, tu as sorti des travaux plus ambients, également avec Pan & Me. Pourquoi aimes-tu l’ambient ? Pour les personnes qui ne connaissent que la musique de Maman Küsters, il est assez étrange de vous imaginer tous les deux composer de l’ambient.

-Cyril : Gaël et moi avons toujours apprécié l’ambient. De Brian Eno à Hiroshi Yoshimura.

– Gaël fait aussi de l’ambient avec ses AKA Moregeometrico et Noroeste. Que peux-tu nous dire de ces deux projets ?

– Gaël : Ce sont de vieux projets d’expérimentation/ambient solo. J’aime toujours jouer et enregistrer de l’ambient.

– Gaël, tu fais également partie du Dale Cooper Quartet, un projet intéressant qui mêle drone, dark ambient, jazz. Comment décrirais-tu ta contribution à ce groupe ?

– Gaël : En fait, ce quatuor (Christophe Level, Yannick Martin, Krystian Sarreau et moi-même) est surtout l’œuvre de 3 personnes. Nous composons tous, nous jouons tous les instruments et on mixe ensemble.

– Même si j’ai acheté et apprécié l’album, je ne savais pas que MonoB vs NoroE était composé de toi, Gaël, et du réalisateur Marc Caro. Tu peux nous en dire plus ?

– Gaël : Marc et moi sommes passionnés de musique expérimentale.

On s’est rencontrés il y a quelques années et on a décidé presque instantanément de faire de la musique ensemble. On a donné plusieurs concerts, et on travaille sur un nouvel album. C’est un incroyable réalisateur de films et un créateur de sons, je suis très heureux de composer avec lui.

– Que peut-on attendre de Maman Küsters, à l’avenir ?

-Cyril : Une recette de pain perdu… on n’a jamais intégré de recette dans les paroles de notre EBM, ça pourrait être génial. À quoi vous attendre ? À des paroles idiotes sur une musique idiote… et à sourire.

– Gaël : On adore composer de nouvelles chansons avec Cyril, et on continuera tant que ça nous plaira.

– Que peut-on attendre de votre concert à l’Ombra ? Pedro va chanter avec vous ?

– Gaël : Le concert sera principalement instrumental car Cyril ne vient pas, Pedro me rejoindra sur scène pour 2 ou 3 titres avec des paroles. On présentera des titres inédits ainsi que d’anciens titres.

Laisser un commentaire

* By using this form you agree with the storage and handling of your data by this website.

This website uses cookies to improve your experience. We'll assume you're ok with this, but you can opt-out if you wish. Accept Read More