Moi aussi, j’ai été un journaliste désespéré. Je me rappelle encore avec angoisse ces jours où, complètement perdu après avoir terminé l’université, je cherchais du travail et où j’envoyais des CV partout comme un fou. C’est pour ça que le nom de ce groupe a attiré mon attention, et j’ai fini par tomber amoureux de leur incroyable post-punk. Nous avons parlé avec Jo Bevan, chanteuse du groupe londonien sur le point de sortir leur troisième disque. Si vous avez la chance de vivre à Madrid, ils joueront le 9 février dans la Wurlitzer Ballroom.
—Avec le bassiste de Desperate Journalist, vous avez joué dans un groupe appelé If… Que s’est-il passé avec ce groupe ? Avez-vous choisi son nom à cause du film If… ?
—Le groupe s’appelait If... et en effet, son nom était en hommage au film. On n’avait plus vraiment d’idées, donc on a pensé qu’il était temps d’arrêter. Par contre, ça a vraiment été une expérience intéressante à l’époque. Je voulais absolument être la Mark E. Smith, mais ça n’a pas bien fonctionné.
—Et la question typique à propos du nom du groupe et de The Cure. À part son nom, pensez-vous que la musique de cette chanson soit spéciale ?
—On aimait le fait que les paroles venaient d’une critique négative du premier album du groupe, et le ton sarcastique employé. Et c’est aussi une piste assez obscure, et qu’on n’a pas tendance à remarquer tout de suite comme référence.
—De nombreux jeunes groupes s’inspirent des groupes des années 80, comme les Smiths, les Chameleons ou The Cure. Pensez-vous que les années 80 sont les nouvelles années 60 ?
—Je crois que chaque génération possède une grande proportion de groupes inspirés par la musique que leurs parents écoutaient étant jeunes.
—Pendant la promotion de vos albums, êtes-vous déjà tombés sur un journaliste désespéré ?
—Une personne qui avait fait la critique d’un de nos concerts a pris notre nom comme une insulte personnelle. Cette personne aurait certainement dû faire une petite recherche sur Google avant de s’énerver de la sorte.
—Votre premier matériel (l’EP Cristina et les singles « Happening » et « Organ ») constituait l’intégralité du matériel que vous avez enregistré vous-même ? Comment avez-vous enregistré cet EP et ces singles ?
—Oui, c’est le cas. Nous avons beaucoup de chance que Keith Topt soit notre ami. Il a généreusement offert son temps dans son superbe studio d’enregistrement de Soho. C’était très gentil de sa part.
—Votre premier album, Desperate Journalist est sorti il y a quatre ans maintenant. Que pensez-vous de ce disque ? L’écoutez-vous ?
—Je crois qu’on a appris beaucoup de choses grâce au processus d’enregistrement du premier album, car on ne savait pas vraiment comment s’y prendre. Honnêtement, je trouve ça bizarre de l’écouter, car je pense que nous avons beaucoup évolué en tant que musiciens maintenant. Mais j’en suis toujours fière.
—Le groupe conçoit les illustrations des albums et s’implique dans la création des vidéos. Est-ce une façon d’avoir un contrôle total sur tout ce qui sort sous le nom de Desperate Journalist ? Ou est-ce une autre façon de vous exprimer ? Vous avez étudié la conception graphique, n’est-ce pas ?
—Effectivement, je conçois toutes les illustrations moi-même. J’ai fait une école d’art, car j’étais fan de Peter Saville et je voulais concevoir des pochettes d’albums. C’est donc l’occasion pour moi de le faire librement.
—Votre dernier album, Grow Up, est sorti l’année dernière, en 2017. Pensez-vous qu’il est plus complexe, en comparaison avec le premier ?
—Il est beaucoup plus complexe au niveau de la musique et des émotions. Nous l’avons enregistré à une période très difficile. D’ailleurs, toutes les paroles sont en relation avec cette période.
—Quels autres groupes post-punk modernes vous intéressent ?
—Preoccupations, Omni, Lithics et Drab Majesty sont les groupes qui me viennent directement à l’esprit.
—Dans la plupart de nos dernières interviews de nouveaux groupes, nous avons fini par parler de The Sound. J’ai lu que vous aimiez ce groupe, pourquoi ?
—Je pense juste que c’est un groupe très économique. Ils en imposent et ils sont bouleversants, sans toutefois en faire trop. Le fait que leurs chansons soient sans fioritures nous sert d’inspiration lorsque nous écrivons notre musique.
—Quelle est la relation du groupe avec la scène gothique ? Avez-vous été invités à un festival de musique gothique ?
—Nous avons joué dans quelques festivals de musique gothique. Ces expériences ont toujours été très divertissantes, car je suis persuadée que nous ne sommes pas du tout un groupe gothique. Par contre, de nombreux goths semblent nous apprécier, ce qui nous convient parfaitement.
—Quelle est la source d’inspiration de vos paroles ?
—Tout ce qui est assez fort pour moi au moment où j’écris la chanson. Habituellement, c’est plutôt l’anxiété et/ou un genre de drame romantique.
—J’entends une pointe d’humour dans vos paroles, ou alors c’est de l’ironie, comme dans « Why are you so boring ». Que pouvez-vous nous dire sur cette chanson ?
—Cette chanson parle d’hommes irritants sans conscience de soi, mais avec trop d’arrogance. Il y en a beaucoup.
—Maintenant qu’on parle des paroles, vous dites que vous aimez Momus, que pensez-vous de sa façon d’écrire ?
—J’adore Momus, car il est indubitablement idiosyncrasique et intelligent. « The Complete History of Sexual Jealousy Parts 17-24 » est une chanson de pop sophistiquée et brillante. Après avoir écouté un album entier de lui, j’aimerais parfois lui mettre un coup sur le nez avec un journal roulé, car il est très prétentieux.
—J’ai lu de très bonnes critiques de votre concert à Madrid, l’année dernière. Nous sommes amis d’Indypendientes, les promoteurs. Quels souvenirs avez-vous de cette expérience ?
—Nous nous sommes très bien amusés et ils nous ont très bien traités. Merci, Indypendientes !
—Que pouvez-vous nous dire de votre relation avec votre label, Fierce Panda ?
—Ils sont à la fois très enthousiastes et nous laissent prendre des décisions, ce qui nous convient parfaitement !
—Que prévoyez-vous à l’avenir ?
—Notre troisième album, In Search of the Miraculous, sortira en février. J’ai hâte que tout le monde l’écoute et de jouer les nouvelles chansons en concert. C’est de loin notre album le plus rempli d’espoir, au son plus épique.
Photos : Nick JS Thompson